Premier Article ! L’extase et la terreur de la page blanche…
J’aimerais commencer modestement par la présentation d’un argument qui me parait non seulement intéressant mais qui me fournit aussi de nombreuses portes vers d’autres questions passionnantes (pour moi en tout cas et bientôt, je l’espère, pour vous aussi). Le raisonnement sur lequel je m’appuie –mais dont je m’écarte parfois- est développé par David Runciman dans son chapitre « The concept of the state : the sovereignty of a fiction » que vous pouvez trouver dans le volume States & Citizens édité par Quentin Skinner & Bo Strath (2003, Cambridge : Cambridge University Press). Et, without further ado, rentrons dans le sujet.
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Définir « l’Etat » a toujours été problématique- ne serait-ce que par sa forme qui ne semble constante ni dans le temps ni dans l’espace. La définition la plus utilisée est sans doute celle de Max Weber :
« une communauté humaine qui, dans les limites d’un territoire déterminé […] revendique avec succès pour son propre compte le monopole de la violence physique légitime.» (Le métier et la vocation d’homme politique, 1919).
Cette définition n’établit pas de priorités entres les cinq éléments qui la composent, et qui sont présentés comme nécessaires, à savoir : le territoire, la revendication, le succès de cette revendication, le monopole de la violence –parfois présenté comme celui de la coercition -, et la légitimité de celle-ci ( La notion de communauté est suffisamment banale pour être laissée de coté: essayez de faire de la politique tout seul dans votre chambre !).
Cependant, l’histoire de la France médiévale peut-être considérée comme la lutte des rois pour établir leur pouvoir, c’est-à-dire pour imposer ce monopole. Devons-nous en conclure que la France n’était pas un Etat durant ces siècles ? (ce qui est, à mon avis, le cas, mais c’est un point discutable -et discuté). Similairement, les possessions des Habsbourgs étaient d’une territorialité plutôt complexe, éclatées entre l’Autriche, des duchés Allemands,- c’est-à-dire en partie seulement dans le Saint-Empire-Romain-Germanique-, le Nord de l’Italie, l’Espagne, les Pays-Bas…s’agissait-il donc d’un Etat même à l’attachement territorial complexe ou d’une autre entité ? Cette question du territoire se pose avec d’autant plus d’acuité que la mondialisation tend justement à effacer les frontières, ou du moins à les rendre moins saillantes. Regardez l’Europe par exemple.
Il devient donc nécessaire de s’interroger sur la définition même de l’Etat : Peut-il être réduit à quelques caractéristiques auxquelles il serait attaché de façon nécessaire ? Doit-il au contraire être défini en termes de buts, de fin ? En a-t-il justement ? (Je pense en particulier à Rawls ou Oakeshott dont je vous parlerais sans doute une autre fois) Ou au contraire, ne pourrait-on pas considérer l’Etat comme une sorte de « fiction légale », ce qui lui confèrerait à la fois son extraordinaire pouvoir d’adaptation face au temps et son incroyable insaisissabilité face aux tentatives de définition ?
Commençons donc par voir avec quoi nous pourrions l’associer. La dernière fois que vous avez vu un Etat qu’avez-vous vu ? Des policiers ? Des fonctionnaires ? Un gouvernement ? (celui qui me répond un Leviathan peut directement passer à la fin de l’article voire à l’article suivant, ou même éteindre son ordinateur et reprendre une activité normale, il perd son temps ici… ). Et pourtant, peut-on dire que ces personnes là sont l’Etat ? L’Etat ne saurait être identifié avec des individus –ou des groupes- nommés pour la simple raison qu’aucun ne pourrait prendre sur lui son fardeau. Gordon Brown ne paie pas de sa poche la dette du Royaume-Uni. De plus, il suffit de voir que si les personnes changent, les Etats restent. Louis XIV pouvait clamer « L’Etat c’est moi ! », ce dernier n’est certainement pas mort avec le roi. Aux mieux, ces gens –gouvernements ou agents- représentent l’Etat dans une de ces capacités.
Peut-on alors identifier l’Etat avec les citoyens ? Cette idée semble bonne puisqu’elle est apparemment soutenue par les concepts de souveraineté du peuple ou de citoyenneté. Et pourtant, les citoyens sont eux aussi des individus nommés qui ne sauraient, à eux seul, être identifiés avec l’Etat. Deux exemples illustrent ce propos. La population d’un Etat change, par renouvellement des générations, par immigration ou émigration, voire par conquête, et pourtant celui-ci demeure. Il arrive qu’un Etat se retourne contre ses habitants –ou une partie d’entre eux-, montrant bien qu’il a une ‘vie’ indépendante de ceux-ci.
Dans ce cas, l’Etat ne se trouverait-il pas précisément dans la relation entre les citoyens et les gouvernants, incarnée notamment par la constitution ? L’idée pourrait n’être pas mauvaise, mais les constitutions, ou les relations, ne font pas la guerre, ne prélèvent pas d’impôts ou ne punissent pas de criminels, alors que les Etats, eux, le font (et souvent en plus !). Il faut donc nous aventurer un peu plus loin dans nos recherches et identifier une entité capable d’agir : c’est l’association. D’ailleurs, tout comme l’Etat, elle a une personne morale, c’est-à-dire indépendante de ses membres en tant qu’individus. Nous sommes donc sur la bonne voie.
Pourrions continuer dans cette direction et identifier l’Etat aux pouvoirs générés par cette association, comme le monopole de la violence légitime? Ce serait faire un pas de trop puisque, par définition, un pouvoir doit être rattaché à autre chose que lui-même (la souveraineté n’est pas souveraine, c’est l’Etat qui l’est). De même, il est impossible d’identifier l’Etat à ses objectifs puisque, par définition, l’instrument est distinct de la fin (et, de surcroit, la question des buts est plutôt épineuse).
Arrivé jusqu’ici, qu’avons-nous trouvé ? Nous avons vu que l’Etat est une association que ne peut être identifié ni avec ses agents, ses membres, sa constitution, ses pouvoirs ou ses buts. Or, « en droit, de telles associations sont des fictions » (Runciman 2003 : 29). Et pourtant le pouvoir des Etats tel que ressenti au quotidien, et parfois brutalement, est bien réel.
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Et si vous êtes sages –et critiques- vous aurez plus de lumière sur ce paradoxe apparent au prochain épisode. Je dois avouer que c’est assez étrange d’écrire en français, que j’en ai perdu l’habitude et qu’un certain nombre d’anglicismes doivent ce cacher dans ce texte, pour lesquels je m’excuse. Je vous encourage même à les critiquer.
C’est marrant, à te lire comme ça (très bon premier article d’ailleurs ! Tu es agréable à suivre !) ça m’a fait penser, dans mon domaine, à la définition d’un être vivant « complexe » (par « complexe » j’entends multicellulaire, c’est à dire formé de plusieurs cellules)… Là non plus on peut pas réduire la définition de l’humain par la somme de ses cellules (les membres), ou pire de ses gènes (une forme de constitution du vivant ?). Niveau gouvernant, c’est le néant, le vivant c’est la pire démocratie qui soit, tout le monde est à égalité, chacun pouvant faire sa loi sur les autres (mais ça arrive à tourner). Niveau pouvoir, qu’on pourrait assimiler, soyons fous, aux organes, c’est pareil, pas moyen de réduire un être vivant complexe à ça… et ses buts… beh le but de l’être vivant, trivialement, c’est de se reproduire (là je vais pas plaire aux éventuels philosophes qui nous lisent ; j’ai l’habitude :p)… Bon, ma pensée est encore un peu brouillon !
En tout cas bonne continuation !
« raisonnement dont je m’écarte »
Il ne faut pas de « – » à « peut-être » ( l’histoire de la France médiévale peut être considérée…)
« aucun ne pourraient prendre sur eux son fardeau »: tu peux pas passer du singulier au pluriel comme ça voyons!
« il à une vie indépendante »: « a » sans accent
Oui c’est sans doute pas faux, Seb, dans la mesure où les questions de définition sont la base de tout sujet et généralement les plus épineuses. Mais c’est à peine surprenant puisque d’une certaine façon, tout (ou presque) est une forme de fiction, d’arrangement plus ou moins arbitraire d’éléments et de concepts qui permettent de rendre le réel intelligible (j’en parlerais sans doute une autre fois)…mais en tout cas j’espère voir cet article sur les êtres vivants bientôt sur ton blog !
Et merci pour les corrections implacables, Leslie, je crois que j’ai passé trop de temps à lire et écrire quasi-exclusivement en anglais… (c’est d’ailleurs une des raisons principales pour lesquelles j’ai décidé de me lancer dans ce projet). Promis, à l’avenir je me relirai mieux.
Bonsoir,
Je suis envoyée par Leslie pour corriger d’éventuelles fautes etc. alors je me permets quelques remarques au passage en espérant que ça ne te dérange pas.
-« ne serait-ce que par sa forme ne semble constante ni dans le temps ni dans l’espace ». Il y a un problème fondamental là 😉 soit « parce que » soit « par sa forme qui ».
– « Devons-nous en conclure que la France n’était pas un Etat durant ces siècles ? (ce qui est, à mon avis, le cas, mais c’est un point discutable -et discuté) ». Quel est ton avis finalement? C’est pas très clair mais Leslie me l’a dit donc tout va bien!
– « aucun ne pourraient prendre sur eux son fardeau ». Je crois que la bonne solution n’est pas vraiment de mettre un « s » à aucun hihi… essaye le singulier partout.
-« Ce serait faire un pas de trop puisque, par définition, un pouvoir ne peut être rattaché à autre chose que lui-même (la souveraineté n’est pas souveraine, c’est l’Etat qui l’est) ».
J’ai l’impression qu’il y a une contradiction là, si un pouvoir ne peut-être rattaché à autre chose que lui même (et pourquoi? il faut bien quelqu’un pour utiliser ce pouvoir non?), alors pourquoi tout à coup la souveraineté est-elle rattachée à l’état (encore qu’être souverain n’est peut-être pas un pouvoir en soi) ?
-« De même, il est impossible d’identifier l’Etat à ses objectifs puisque, par définition, l’instrument est distinct de la fin (et, de surcroit, la question des buts est plutôt épineuse). » Et ça c’est plus clair, mais c’est une opinion, pas une impossibilité logique absolue.
Très bon article sinon! Bon courage pour la suite.
Bienvenue (une autre correctrice! au secours!) et merci pour tes remarques.
1) bien vu, le « qui » avait en effet disparu !
2) Mon avis c’est qu’on ne peut pas considérer les royaumes médiévaux comme des Etats, à cause, entre autres, de cette question du territoire (mais par contre je n’ai aucun problème avec la polis antique). Mais après c’est un long débat dans lequel je ne veux pas rentrer, d’où l’allusion en passant simplement [mode pub on] J’espère en parler un peu plus dans le prochain article [/mode pub off])
3) aucuns, aucun, c’est la faute à wikitionaire ! (J’ai eu un doute, j’ai vérifié et j’ai validé… mais voila, aucun au pluriel se rapporte seulement à des noms dont le singulier n’existe pas, et ça, je ne l’avais pas vu!)
4) Oui la phrase telle qu’elle est ne veux rien dire (c’est un anglicisme avorté), le sens est évidemment qu’il ne peut être rattaché uniquement à lui même, je corrige.
5) Là par contre, je ne suis pas d’accord. Ce n’est pas une opinion c’est une impossibilité logique. L’instrument sert à atteindre un but, c’est un moyen pour un fin, et c’est en ce sens qu’il est distinct. Si la fin et le moyen se confondent, alors alors il suffit que ce dernier *existe*, il lui suffit d’*être* et non se *servir* à quelque chose, c’est à dire d’avoir une valeur *instrumentale* (je sais pas si je suis clair en si peu de lignes?).
Mais en tout cas merci pour avoir relu et tenu jusqu’au bout , je serai plus vigilant à l’avenir sur les coquilles et les anglicismes (et les erreurs de français)
5) Oui d’accord j’avais mal lu en fait, et j’avais compris « associer » au lieu d' »identifier », vas savoir pourquoi…et du coup j’approuve.
Par contre! « aucun ne peut prendre sur lui » me semble la seule solution. Ta conjugaison au pluriel n’est pas bonne puisque si il y en a aucun, il y en a pas un et encore moins plusieurs. (et sinon merci pour la précision orthographique, moi je ne connaissais que « d’aucuns… » comme forme prenant un « s »)
Oui, je suis d’accord et j’ai changé pour aucun. Ce que je voulais dire c’est que, lorsque j’ai eu un doute, j’ai regardé wikitionaire qui m’a dit « aucun, aucuns » et je me suis dit « c’est bon » sans prendre la peine de lire à quoi s’appliquait « aucuns ».
Oui oui mais après il faut que tu accordes le reste de la phrase au singulier.
Je viens de relire ton article, et il est vraiment très intéressant, mais il reste encore quelques coquilles! Etant donné que je me suis autoproclamée correctrice en chef je me dois de te les signaler (et oui, je sais, je suis « légèrement » enquiquinante).
Tout d’abord t’as vraiment du mal avec le « aucun-aucuns » 😉 Je vais donc te donner la solution, ça sera plus simple: « aucun (d’entre eux) ne pourrait prendre (à lui seul) son fardeau », ce qui n’est pas très clair non plus, je te l’accorde, mais au moins c’est correct grammaticalement parlant. Néanmoins, je pense que tu devrais changer la formulation.
La deuxième coquillette que j’ai trouvée (j’allais faire une blague foireuse mais je me suis retenue…) est la suivante:
« un pouvoir doit rattaché » : il manque le verbe » être » : « un pouvoir doit être rattaché ».
Promis, la prochaine fois je laisserai des commentaires sur le fond 🙂
En effet… Il faut que j’arrête de faire des corrections le soir en étant lessivé, je rajoute autant d’erreurs que j’en corrige !
Wouh, un blog intéressant ! Écrit par un anglais d’adoption, en plus !
Bon, avant toute remarque, je commence par te plaindre ! Les filles sont des chieuses nées, mais au point de passer son après-midi à faire le job de M. Word, même pas payée, et juste pour emmerder le monde, je trouve ça très fort !
Enfin bref ! Après tout, tu as encouragé à la critique, ça serait presque de ta faute !
Bref, je vais aussi parler de la forme, tiens (mouahaha); c’est vrai que chez les Anglais, écrire est un acte plus « libre », avec le fameux principe « une idée par paragraphe », maaais… Perso, je préfère notre didactique française, avec des idées hiérarchisées, tout ça. Quitte à titrer les paragraphes, ça a le mérite d’être plus clair et organisé, je trouve. Je dis ça parce que comme tu vulgarises ton sujet, il faut que tu t’attendes à être lu par des vulgaires (bonjour !), qui, en plus de se concentrer sérieusement sur le sujet (coriace) de ton article, se brûlent carrément la cervelle à essayer de déchiffrer un texte écrit à l’anglaise ! Par exemple, il m’a fallu un peu de réflexion avant de faire le lien entre la définition et l’histoire de la France médiévale :p (en fait, ton article est clair, mais je défendrai les traditions littéraires de mon pays jusqu’à la fin :p)
Bref, pour le fond je vais avoir du mal à dire des trucs intéressants, vu que, déjà loin d’avoir mon Bac, je suis à des années lumières de parler de politique.
J’ai trouvé difficile d’entrer dans le sujet par une négation: » l’Etat est une association qui ne peut être identifiée ». (désolée, mais it’s so British ! ) J’ai bien compris qu’on ne pouvait pas identifier l’État avec ses agents, ses membres et sa constitution (d’autant que l’Angleterre n’en a pas, mais c’est bien un État, non ?), mais j’ai mal saisi la notion d’ « association »; si j’ai bien lu, c’est une « entité capable d’agir », m’enfin ça reste un truc d’initié :p Tu pourrais éclairer ton point ? Parce que du coup, je suis passée à côté du paradoxe :p (et c’est très frustrant !)
Sinon, pour définir l’État auprès d’ignares comme nous, je serais partie de quelque chose de plus général, plutôt que d’un paradoxe. La relation entre l’idée de nation et d’état, par exemple; c’est une relation chère aux Français (tu me diras, avec De Gaulle et Pétain, c’est un paradoxe aussi, mais on part quand même du principe que l’État gère la nation, non ?) Et puis pour donner une définition simple avant de s’intéresser aux idées compliqués de ce cher Weber, tu pouvais quand même parler de la dimension juridique, institutionnelle, tout ça… Enfin je pense que j’aurais mieux saisi le concept si tu étais parti de quelque chose de plus général :p (quand je dis « je », je parle pour toute la communauté des non-initiés, tu auras deviné !)
Malgré tout ce que j’ai dit, j’ai beaucoup aimé ton approche; c’est tellement exotique de se poser plein de questions plutôt que de ce concentrer sur une et d’essayer d’y répondre ! Ça accroche le lecteur, et puis on s’y fait assez vite, finalement ! (Ça reste aussi très compréhensible, malgré les coquilles tragédiquement raciniennes repérées par tes collègues, pas la peine de complexer, hein) J’ai hâte d’avoir la suite; ça sent la culture générale béton :p
Que de définitions ! Mais le plus simple ne serait-il pas de définir l’état comme « interactions » ; rapport de dominants à dominés, avec acceptation des deux partis de ce rapport ? A vrai dire ce genre de définition ferait de l’état quelque chose d’adaptable à n’importe quelle échelle de communauté humaine. En fait, l’état peut être pays, cité, voire même « tiers-pays » (division bellatores oratores laboratores au moyen âge (bien obligé d’utiliser des mots de cuistres sur un tel blog :p ), et je pense qu’on peut diviser l’état à l’infini, si bien qu’il suffirait d’un interaction entre deux individus pour les considérer comme formant un « état » (si on osait faire un parallèle douteux, mariage/divorce = régime/tête en moins de louis XVI ? :p )
Il n’empêche que je trouve ce genre de définition basée sur la récurrence d’une « interaction à deux » est plus rigoureuse et mathématique que toutes les tentatives de définir l’état que tu as posées. Et en effet, définir l’état à partir de composantes qu’il induit (police, état social, citoyens) c’est un peu comme définir ce qu’est un jeu de cartes en partant juste de l’as et du roi de coeur, non ? Déjà posons l’état comme ayant 54 cartes, ça ira mieux ensuite !
Après, penser l’état comme fiction…Dans l’absolu tout est fiction ; l’état c’est une concept flou, variant et irréel, comme tous les concepts ^^la carte n’est pas le territoire comme dirait Korzybski (non c’est pas cuistre ça, c’est dans un bouquin de sf ^^) Bref, c’est un peu chercher la merde quand même ! (surtout que chaque philisophe/politologue/théoricien/leviathan repose ses bases de ce qu’il considère comme état ou contrat social avant de raisonner dessus. d’un point de vue pratique donc, je ne suis pas non plus certain que la recherche d’une universalité du sens de l’état soit très pertinent (à vrai dire il serait plutôt là le paradoxe )
Voilà voilà, sinon ça sent le blog propre et bien construit, félicitation pour ce premier article !
Au plaisir !
Nyd, Julianos, faut arrêter de poster des coms aussi longs: ils doivent dépasser mon article !
@Nyd: Ce n’est pas un souci les corrections. Vu que je ne lis ni n’écris plus en français depuis trois ans, ça aide !
Pour la structure, je pourrais te dire qu’il ne s’agit pas d’une dissertation ou d’un essay mais d’un billet de blog, donc la forme est plus libre. C’est vrai que la transition avec les exemples -bien que introduite par le « cependant »- est pas aussi élégante qu’on pourrait le vouloir. Mais la logique, et à mon avis c’est la logique de tout argument, est la suivante: ‘point’=> exemple qui montre et qui infirme ou soulève d’autres questions (si tu trouves un exemple qui soutient parfaitement un argument, je veux bien te donner un Nobel !)=> point suivant, etc… D’où le fait que je passe sur un point d’exemple illustrant les capacités listées au dessus mais en même temps montrant en quoi elles sont problématiques.
Après y’a aussi le problème de wordpress: je voudrais pouvoir coller les paragraphes et les indenter, et décoller d’autres, plutôt que d’avoir une demi ligne ou une ligne et demi comme seules différences….
Et puis d’une manière générale, la structure pour la structure… Disons que ce qui compte n’est pas le fond en tant que fond mais le fond en tant que suite logique d’argument. Un des problèmes avec la structure telle que je l’ai vécue au lycée en France c’est justement le coté trop formel qui peut tendre vers une liste ou une juxtaposition (« 1) je parle de ça, 2) je parle de ci ») ce qui, à mon sens, est le pire péché que tu puisses commettre dans un écrit. Il est infiniment mieux, à mon sens dire « je parle de ça » mais/cependant/si on considère telle chose, alors « ceci » et tu enchaines et si la structure gène, qu’elle aille au diable !
Une certaine image que j’en ai c’est celle des béquilles: quand tu apprends à écrire (notamment au collège/lycée) c’est très bien de mettre partout des « Premièrement », « maintenant je vais parler de ça », de la même façon que lorsque tu as perdu ou pas encore acquis la faculté de bien marcher, c’est très utile de te donner quelque chose de rigide (« béquille ») pour tenir debout. Mais lorsque tu as acquis cette faculté -c’est à dire lorsque tes arguments sont structurés par le fond et leur logique interne plutôt que une forme imposée- lorsque tu essaies de courir ou de grimper sur les rochers, alors autant enlever les béquilles…
« D’autant que l’Angleterre n’en a pas, mais c’est bien un État, non ?), »=> Dans le sens constitution « document écrit avec tout dedans », non elle le Royaume-Uni n’en a pas. Mais tu peux la reconstituer à travers les différents documents et jurisprudences (voire aussi les ‘traditions et habitudes’, très importantes dans un pays de Common Law) qui la composent. Voire tu peux prendre constitution dans un sens large en tant que « arrangement des parties » -c’est dans ce sens qu’Aristote l’entend quand il parle de la « Constitution des Athéniens »- et là évidemment, la question ne se pose plus. Mais quelque soit l’acception que tu prends, les trois sont compatibles avec l’argument ci-dessus.
Pour l’association: Je ne l’ai pas définie parce que c’est au fond assez trivial (tu peux penser à un groupe qui est plus qu’une communauté puisqu’il possède une organisation formelle et une personne légale par exemple) et surtout ça n’est pas nécessaire pour le paradoxe. Celui-ci n’a pas lié au fait que l’Etat soit une association, mais qu’il soit une fiction. Or ce terme est généralement associé aux notions d’imaginaire, d’irréel (fiction littéraire etc.) OR le pouvoir de l’Etat est bien réel ! Il peut tuer des gens, taxer des citoyens, ou les emprisonner ! D’où le paradoxe…
Pour l’approche: C’est justement ça qui est intéressant: prendre une question qui à l’air paradoxale et problématique- l’Etat est-il une fiction?- et en tenter d’y répondre. L’article ne pose qu’une seule question, c’est celle là. Mais, pour y répondre, tu as besoin d’en poser plusieurs autres au fur et à mesure que ton raisonnement avance – c’est d’ailleurs ce cycle de problème=>solution=>problème qui fait avancer un raisonnement. Venir donner des définitions de l’Etat est au fond assez inintéressant, tu peux ouvrir wikipedia et trouver bien plus de trucs. D’ailleurs je n’essaie pas tant de définir l’Etat que d’élucider cette question de la fictionalité, sauf qu’au passage il faut comprendre la nature de celui-là pour élucider celle-ci. C’est justement ça qui est intéressant avec les paradoxes et les problèmes: ce sont les endroits où les différentes tentatives de comprendre le monde, de le théoriser et le conceptualiser, se rencontrent, se cassent, se fracturent -et tu peux en étudier le contenu. C’est l’équivalent d’une faille pour un géologue: bien plus intéressante que le milieu plat d’une plaque !
Pour l’approche juridique et institutionnelle, ce n’est pas directement pertinent par rapport à la question que je pose. Le mot « Etat » (bien plus que « State » d’ailleurs) recoupe deux concepts: l’Etat tel que compris en philosophie/science politique, et c’est à quoi je m’intéresse, et l’Etat en tant qu’unité/personne administrative et juridique. Et si le second est relativement bien défini (de la même façon qu’une région ou un département), le premier est assez complexe.
Quant à l’idée de nation, je préfère ne pas en parler pour l’instant. La relation entre Etat et nation est contingente, dépendante de faits historiques et pas d’une relation logique nécessaire. D’ailleurs les deux n’ont pas le même statut: tu peux facilement identifier une nation à ses membres (c’est même le premier moyen de la définir), alors que ce n’est pas le cas de l’Etat. Et d’ailleurs tu as des nations sans Etats (les Kurdes par exemple, même si la question est complexe) ou des Etats constitués de plusieurs nations (Autriche-Hongrie avant 1918, Tchécoslovaquie etc.).
@ Julianos, Quand tu dis définir l’Etat comme des interactions, je suppose que tu veux dire celles de dominant dominés telles que tu les développes après. Je vois deux objections principales : la première, c’est que –et ton exemple le montre bien- dans ce cas là l’Etat peut être n’importe quoi ! Si on cherchait une définition de communauté (généralement ça commence à trois en sciences sociales :p) ou de politique, pourquoi pas ; mais pour définir l’Etat, ton approche pose problème dans la mesure où elle permet de tout inclure. L’intérêt d’un concept c’est qu’il permet de discriminer, d’identifier, de comprendre. Si ton concept englobe tout le réel, alors il est sans utilité aucune. La deuxième objection, que je développe d’ailleurs dans l’article lorsque je parle de constitution, c’est qu’une interaction ne peut pas agir. Une interaction ne prélève pas de taxes ou ne tue pas des gens.
« Et en effet, définir l’état à partir de composantes qu’il induit (police, état social, citoyens) »
=> Justement, je dis bien qu’on ne peut pas associer l’Etat à ses représentants (police), à ses fonction (police, état social) ou ses membres (citoyens).
J’ai l’impression en vous lisant tous les deux qu’il y a un certain malentendu sur le sens de l’article : je ne cherche pas à arriver à une définition exhaustive de l’Etat, je tente de répondre à la question l’Etat est-il une fiction, qui est le titre de l’article ? En relisant (et je blâme entièrement WordPress :p), je vois que j’aurais du insérer quelque chose (étoiles, trait etc.) à la fin de la conclusion : « Ou au contraire, ne pourrait-on pas considérer l’Etat comme une sorte de « fiction légale », ce qui lui confèrerait à la fois son extraordinaire pouvoir d’adaptation face au temps et son incroyable insaisissabilité face aux tentatives de définition ? ».
Mais ceci dit il est tout à faire possible de définir l’Etat à l’aide d’une méthode de « construction » comme la tienne, en isolant un élément clef (dans ce que tu proposes, la relation dominant, dominé) et en tirant les conséquences, jusqu’à arriver à une forme développée. C’est une approche qui à son mérite (d’Aristote à Nozick, bon nombre s’y sont essayés), mais, à mon sens, trop dépend des éléments que tu isoles au début. Alors que la méthode employée ici à l’avantage de prendre l’Etat tel qu’il existe –puisque c’est ce qui nous intéresse- et de voir avec quels éléments le composant (membres, gouvernants, constitution, pouvoirs etc.) on peut l’identifier. La réponse, à la fin, étant « aucun » (sans S !).
« Après, penser l’état comme fiction…Dans l’absolu tout est fiction », héhé petit malin… tu as tout compris. Dans un sens plus profond tout est effectivement fiction, création (j’y fais d’ailleurs allusion dans mon premier commentaire). « Man is an animal suspended in webs of significance he has spun himself » comme dirait le cher Weber (et je vous épargne le topo sur Nietzsche, Geertz et le reste.. mais ça viendra pour un prochain article !)
Sinon petite correction : pas tous les auteurs s’appuient sur un contrat social (seulement les « contractualistes » et encore…). Mais justement, si y’a une forme d’universalité dans l’Etat, c’est bien qu’il perdure ! C’est notre « frame of reference » pour le et la politique depuis l’Antiquité… même si sa forme recoupe différentes réalités ! C’est justement le paradoxe sous le paradoxe que j’évoque. Et d’ailleurs, c’est parce que c’est une fiction qu’il possède cette capacité : l’Etat en tant que fiction n’est pas lié à une palette finie de caractéristiques ou de composant mais a justement une certaine plasticité à ce niveau. Et c’est la sa force… mais chut, je mors déjà sur le prochain article.
Ah oui, et je vous blâme entièrement pour ce post bien trop long…
(d’ailleurs wordpress l’a coupé en postant)
Diantre, et une claque pour la dialectique ! Essay ou non, les billets de ce genre nécessitent une bonne structure ; qui dit idée dit formulation de l’idée, non ? Ce que je reproche au système anglais de points séparés, c’est que le lecteur peut perdre le fil conducteur très vite. Avec plus de hiérarchie (ce qui implique l’usage d’adverbes du genre « premièrement » quand on débute, mais certainement pas avec un peu d’expérience), on comprend mieux où l’auteur veut en venir, et quels chemins il emprunte pour ça, trouvé-je. Enfin bref, tête de mule pour tête de mule, je plaide pour le french system !
Ah, des commentaires trop longs ? Mais c’est que tu les réclames, alors hein ! Et puis c’est toujours agréable les longs commentaires ; les gens ne passent pas trois plombes à rédiger un truc pour un texte inintéressant ! Et puis ça te change des corrections orthographiques :p
D’accord pour le reste ; en effet, j’ai mal saisi l’approche de ton raisonnement (pas d’annonce de plan, c’est fatal ! :p) ; je pensais qu’avant de répondre à ta problématique, tu te proposais de donner une définition de l’État. Tu peux aussi blâmer ton introduction qui n’a pas clairement défini de quoi tu allais parler dans ton article ! (nan mais oh :p)
« Diantre, et une claque pour la dialectique ! »=> euh non justement… je n’ai rien, ni rien dit, contre la dialectique. Si le raisonnement impose de dire « blanc, noir, gris », je ne vois aucun problème à adopter un plan qui le suit. Et d’ailleurs c’est souvent comme ça que tu peux faire avancer un raisonnement. Mais je ne vois pas pourquoi je forcerais un raisonnement dans un plan… »thèse, antithèse, foutaise », comme me l’a dit un jour une prof de français
« au système anglais de points séparés, »=> le système anglais n’est pas un système de points séparés ! Quand je parle de structure, j’entends « structure à la française avec un nombre de parties et de sous parties bèèètement imposé ». Évidemment qu’un texte a besoin d’une structure. Et le système anglais (si ça veut dire quelque chose) impose justement d’avoir une logique impeccable dans la progression de son argument afin de ne pas avoir à s’appuyer sur des « béquilles » structurelles. Je peux te dire que le moindre essay qui ressemble à des points séparés que je rends se fait descendre immédiatement.
Sinon oui l’introduction est sans doute pas assez focalisée, et surtout la fin de cette introduction est mal marquée. Quand à annoncer un plan pour un annoncer un plan, ça me semble une perte de temps: le lecteur est n’est pas alzheimerien et je n’oserais insulter son intelligence en le prenant par la main. Par contre, expliquer ce que je vais faire si il y a besoin d’explications (voie détournée, raisonnement complexe, etc) , là oui, sans problèmes. Toute la différence réside dans le fait qu’il s’agit d’une explication et non d’une exposition.
Ah et j’oublais: je râle, je râle; mais au fond je suis content quand les gens critiquent ! :p